Jean-Marie – Le Paradoxe de l’oeuf et de la poule

Chroniques du temps covidien 10

Le paradoxe de l’œuf et de la poule…

On énonce habituellement ce paradoxe par cette question simple ; qui est apparu le premier, l’oeuf ou la poule ?

C’est une façon de poser un problème biologique qui ne permet pas de trouver de réponse satisfaisante. Pire, elle favorise l’occultation de la seule explication scientifique malheureusement un peu plus difficile à appréhender. Car n’oublions pas que les oiseaux descendent des dinosaures qui eux-mêmes déjà pondaient des œufs amniotiques et que cette évolution s’est faite très lentement sur des millions d’années. Une sélection naturelle à coup de mutations infimes et imprévisibles dont on voit aujourd’hui l’aboutissement mais qu’on peine à imaginer le déroulement.

Je pensais à ce paradoxe en lisant un courrier d’un lecteur de la Voix du Nord du 17 avril qui répondait à un autre qui lui affirmait que les salariés n’avaient pas eu leur mot à dire sur les stratégies économiques des entreprises et notamment du phénomène des délocalisations. Voilà sa réponse ; «  C’est discutable. En privilégiant la facilité, les produits aux prix les plus bas, les consommateurs qui sont souvent aussi des salariés ont contribué au phénomène de la mondialisation et aux effets mortifères auxquels nous assistons actuellement ».

Qui donc en définitive est responsable de la mondialisation et des délocalisations ? Les consommateurs ? Les entreprises ?

Comme pour le paradoxe énoncé plus haut c’est la même façon de poser un problème qui ne permet pas de trouver de réponse satisfaisante. Au mieux on finira par conclure que les consommateurs et les entreprises ont des responsabilités partagées.

Mais pire, là aussi c’est une façon d’occulter une explication beaucoup plus rationnelle et cohérente.Celle de la loi du marché de notre système économique capitaliste qui met en concurrence des entreprises qui fabriquent des produits similaires. Car elle nécessite de chacune une recherche constante de compétitivité qui passe par une réduction des coûts de productions matériels et humains. Une réduction des coûts qui peut se faire par l’augmentation du temps de travail (pas possible partout), l’intensification du travail (augmentation des cadences), la baisse des salaires (précarisation, CDI, autoentrepreneurs…), la technologie (robotisation), et puis quand tout cela n’est plus suffisant ou possible, la délocalisation qui règle tous les problèmes d’un coup. Temporairement parfois parce qu’on a vu des grandes entreprises délocaliser une seconde fois, à cause de la hausse des salaires du premier pays d’accueil (notamment la Chine), vers d’autres contrées moins exigeantes. Et pourquoi donc cette infernale recherche de réduction des coûts si ce n’est pour le maintien ou l’augmentation des dividendes des actionnaires dont la seule tâche est de passer à la caisse !

Le comble est quand notre lecteur de la presse régionale accuse « les consommateurs qui sont aussi souvent des salariés » qui « ont contribué au phénomène de mondialisation et aux effets mortifères auxquels nous assistons actuellement ».

Ils seraient donc également co-responsables de la mort de milliers de personnes atteintes du coronavirus parce qu’ils auraient privilégié les produits aux prix les plus bas.

L’exemple est particulièrement mal choisi car quelque soit le pays, en dehors des hésitations et des décisions plus ou moins tardives des responsables politiques, une des raisons de l’expansion et de la forte mortalité de la pandémie est bien la non disponibilité du matériel nécessaire aux soignants pour travailler dans de bonnes conditions ; masques, gants, sur blouses, médicaments, tests, respirateurs…., et tout cela à cause de quoi ? De fermeture d’entreprises ou de délocalisations, les deux étant souvent liées.

Difficile pour le coup de tenir pour responsables les consommateurs !

Ce discours malhonnête sur la part de responsabilité des consommateurs que l’on l’entend trop souvent prononcer à la légère est insupportable. Nous serions toujours au final en partie responsable par nos choix de tout ce qui se fait, de la priorité donnée à la voiture par rapport aux transports en commun, des pollutions, de la malbouffe, etc, etc…

Il suffit de voir les récentes et immenses difficultés rencontrées tous ceux qui se sont battus pour mettre en place un code visuel simple et clair sur les aliments transformés, pour interdire la pêche électrique et le pillage des fonds marins, etc, etc….

Albert Einstein avait cette formule mordante et pleine d’ironie que je trouve bien adapté pour conclure notre propos:

« Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue. »

Bien à vous.

Jean Marie


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